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Sortie du 27 novembre 2022

Le 27 novembre l'association Magma UPS a organisé une sortie dans le gisement historique du Cambrien de Coulouma à Pardailhan (Hérault), ouverte aux personnes intéressées (adhérentes ou non).

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Historique

L'âge Cambrien a été créé par Adam Segwick en 1835 mais ce n'est qu'en 1887 qu'on a trouvé le premier fossile du Cambrien de France, à Ferrals les Montagnes (Hérault), à 17km environ de Coulouma.

Le découvreur de ce fossile (qui est un céphalon de trilobite du genre Conocoryphe, comme celui en première page), Jules Bergeron, participe alors à la création d'une carte géologique de la France et étudie particulièremet les terrains de la Montagne noire et de l'Aveyron. Bergeron va établir une première stratigraphie pour le Cambrien qui va s'avérer assez fausse : les terrains sont très plissés (parfois au cours de plusieurs épisodes différents) et recoupés par de nombreuses failles qui rendent la corrélation entre les affleurements très compliquée.

Jean Miquel qui habitait à 3 km de Coulouma reprend l'étude des fossiles des ravines en dessous de 1893 à 1925. On lui doit une partie des collections dispersées dans des musées à travers le monde. En 1935 Marcel Thoral décrit et classe les trilobites du Cambrien dans les principales familles (solénopleuridés, concoryphidés). En 1949 Bernard Gèze découpe le Cambrien et l'Ordivicien de la Montagne noire en unités. On lui doit notamment la reconnaissance de la structure en nappes.

C'est l'abbé Courtessole, qui avait connu la Montagne noire à l'époque où il était résistant dans le maquis, qui va faire connaître les gisements de Coulouma (il y en a une vingtaine sur un kilomètre, au sud du hameau) et proposer une découpe en plusieurs niveaux A à F basée sur des associations de faunes typiques. Il publie en 1973.

 

Paléontologie

Depuis Courtessole les faunes de Coulouma sont toujours étudiées. Elles sont particulièrement importante de par la rareté des faunes cambriennes européennes et l'utilité des trilobites comme fossiles stratigraphiques alors que les subdivisions du Cambrien sont toujours débattues.

On y retrouve notamment des solenopleuropsinés qui servent pour la biostratigraphie du Cambrien moyen en Europe du sud-ouest : le genre Badulesia pour le Caesaraugustien inférieur, Pardailhania pour le Caesaraugustien moyen, Solenopleuropsis (Manublesia) pour le Caesaraugustien supérieur et Solenopleuropsis (Solenopleuropsis) pour le Languedocien inférieur.

Ces âges sont aujourd'hui regroupés dans le Miaolingien (≃509 à 497Ma) et les faunes de Coulouma sont donc contemporaines de celles des schistes de Burgess (Canada).

On y trouve principalement des trilobites, rarement entiers et généralement fragmentaires (plèvres, joues libres, pygidiums, céphalons...), dans certains niveaux des échinodermes (cténocystoïdes, cincta, édrioastéroïdes et éocrinoïdes) et des brachiopodes (lingules du genre Acrothele). On peut également trouver des éponges et des hyolithes

Les biozones (définies d'après Courtessole) sont :

A : calcaires et pélites avec principalement les genres Paradoxides, Pardailhania, Badulesia et Conocoryphe

B : schistes troués (les trous correspondent à des nodules calcaires qui sont quelquefois visibles qu'on a d'ailleurs aperçu pendant la sortie) avec Paradoxides, Conocoryphe et quelques échinodermes (cténocystoïdes)

C : schistes verts ou rouges avec la même faune qu'en B et des trilobites du genre Solenopleuropsis,

des lingules (Acrothele) assez fréquentes et quelques échinodermes (cténocystoïdes)

D : pélites vertes ou beiges à agnostidés abondants (minuscules trilobites dont le pygidium ressemble au céphalon) avec quelques éponges et échinodermes (cténocystoïdes et éocrinoïdes)

E : pélites vertes ou beiges à Conocoryphe et Solenopleuropsis abondants avec des échinodermes (cténocystoïdes, cincta, édrioastéroïdes et éocrinoïdes)

F : pélites vertes ou beiges à Conocoryphe et très nombreux échinodermes* (stylophores, cténocystoïdes, édrioastéroïdes et éocrinoïdes)

*l'appartenance des stylophores aux échinodermes (homalozoaires) est remise en cause. Les homalozoaires sont des échinodermes (tous éteints) qui ne présentaient pas de symétrie pentaradiée (cténocystoïdes, cincta) contrairement aux édrioastéroïdes et aux éocrinoïdes (et plus tard aux oursins, étoiles de mer et crinoïdes)

Céphalon de Conocoryphe sp. (contre-empreinte à gauche et empreinte à droite)

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Paradoxides sp. presque entier (gauche) et thorax (droite)

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Échinodermes homalozoaires (probable Succocystis sp. à droite, et à gauche ?)

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Joues libres de Paradoxides sp.

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Céphalon de Ctenocephalus sp. (contre-empreinte à gauche et empreinte à droite)

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Lingule (brachiopode, à gauche) et deux fragments de céphalon (droite)

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Paradoxides sp. presque complets (à dégager)

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Schéma d'un trilobite : I) céphalon ; II) thorax ; III) abdomen ; 2 : joue libre ; 3 : pointe génale ; 4 : glabelle ; 6 : joue fixe (joue fixe + glabelle = cranidium) ; 7 : oeil ; 9 : plèvres

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Histoire géologique

Pendant le Cambrien moyen à supérieur de la Montagne noire on constate un passage discontinu de conditions de plateforme carbonatée, avec des dépôts calcaires puis des nodules, à une sédimentation terrigène avec des pélites (Alabouvette et Demange, 1993). C'est dans ce contexte que se dépose la formation de Coulouma. On retrouve la même évolution dans les Pyrénées (Laumonier, 1998).

Au Carbonifère, avec la formation de la chaîne hercynienne, les terrains de la Montagne noire sont poussés vers le nord et s'écrasent le long de la faille des Cévennes en contexte de transpression (Chardon et al., 2020 ; une étude menée au GET à laquelle à d'ailleurs participé notre membre bienfaiteur Markus Aretz).

À cette époque les roches et parfois les fossiles de trilobites sont déformés tandis que la Montagne noire se structure en deux versants séparés par une zone axiale métamorphique. Coulouma se retrouve dans la nappe de Pardailhan au sein du versant sud qui est constitué de plusieurs nappes à plis kilométriques deversés (avec localement des plis de 2ème ordre) affectés par de nombreuses petites failles. L'une d'elles recoupe d'ailleurs le sentier du Touring Club.

Déroulement

Nous pouvons remercier Jean-Paul et Marie-Hélène Kundura sans qui cette sortie n'aurait pas été possible puisque ce sont eux qui ont fait découvrir le gisement à certains d'entre nous (eux-même ayant découvert le gisement avec D. Vizcaïno, qui l'avait visité avec l'abbé Courtessole !) : la transmission est ainsi assurée.

Partis vers 8h50 de la fac, on s'est retrouvés dans Coulouma vers 10h50. Nous étions une quinzaine d'étudiantes et d'étudiants, ainsi que deux parents qui nous ont suivis pendant cette sortie.

Nous sommes ensuite allés sur le sentier du Touring Club présenter le gisement, les différents affleurements et niveaux, puis chacun a commencé à chercher. Quelques personnes n'avaient pas de marteaux et nous avons eu du mal à en trouver. Vers 12h30 on a mangé et nous nous sommes remis en quête des fossiles.

 À Coulouma, les fossiles sont nombreux mais la plupart sont fragmentaires. Par ailleurs, le plan de schistosité n'est pas tout à fait identique au plan de stratification ce qui fait que des fossiles entiers se cassent très rarement comme on pourrait l'espérer !et me modifier. C'est facile.

Dégagement d'un céphalon de Conocoryphe sp.

Vers 15h, une partie des participants est rentrée et, les 8 restants, nous avons repris la voiture pour aller sur un autre affleurement proche et plus petit (niveau F), en forêt, avec une vue sur les combes au sud et de belles découvertes.

Peu avant 17h, la luminosité diminuant beaucoup, nous sommes rentrés sur Toulouse. Nous avons eu de la chance puisqu'il n'a pas plu, contrairement à ce qu'annonçaient les prévisions quelques jours auparavant.

Les frais d'essence des trois étudiants conducteurs (30 euros) ont été pris en charge par l'association.

Références

Alabouvette B., Demange M., 1993, Notice explicative de la feuille Saint-Pons à 1/50000 du BRGM.

Alvaro J., Vizcaino D., 1998, Revision biostratigraphique du Cambrien moyen du versant meridional de la Montagne Noire (Languedoc, France). Bulletin de la Société Géologique de France, 169-2

Chardon, D., Aretz, M., Roques, D., 2020. Reappraisal of Variscan tectonics in the Southern French Massif Central.Tectonophysics, vol. 787

Laumonier B., 1998, Les Pyrénées centrales et orientales au début du Paléozoique (Cambrien s.l.): évolution paléogéographique et géodynamique, Geodinamica Acta, 11-1

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Auteur : Dorian Malcoeffe.

Merci à J.-P. Kundura pour l'aide à la détermination des fossiles.

Mise en page web :Amélie Vrancic

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